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07 avril 2021

SEM-REV : itinéraire du 1er site européen d'essais en mer multi-technologies connecté au réseau

Bertrand Alessandrini (ECL 1989) est chercheur en ingénierie océanique et Directeur de développement de Centrale Nantes. Depuis 2007, il est également porteur du projet Sem-Rev, né un an plus tôt du cerveau des chercheurs de Centrale Nantes. Objectif : construire un site réservé en mer, au large, connecté au réseau électrique national, équipé d’une instrumentation spécifique pour tester « un jour » les prototypes XXL d’éoliennes flottantes et plus généralement les dispositifs énergétiques marins. Quinze années plus tard le rêve s’est réalisé…


Pourtant ce site d’essais en mer, plateforme de recherche technologique hors normes, ne s’est pas construit en un jour. Bien au contraire il a fallu l’acharnement des équipes techniques, des directeurs successifs (ils se reconnaitront) et de tous les financeurs, de l’Europe aux collectivités territoriales pour survivre dans cette aventure.

Il a fallu déjouer les pièges de tous ordres :

- Comment obtenir une concession en mer ou une autorisation de connexion au réseau électrique national lorsque qu’on ne sait pas encore quel dispositif va être testé ?

- Comment passer le câble principal tout en permettant aux pêcheurs de poursuivre leur activité et en traversant un estran classé Natura 2000 ?

- Comment réparer un défaut majeur électrique à 30m de profondeur quand on n’a aucune idée de là où il se situe sur 20km de longueur ?

- Comment investir 25M€ d’équipement quand on ne dispose que du quart de ce budget ?

- Comment ne pas perturber l’approche finale du Beluga Airbus ?

- Comment ne pas trop perturber les radars militaires ? Et surtout comment éviter qu’au petit matin on ne découvre un prototype de 5000 tonnes échoué sur la plage de la Baule ?


Quinze années ont été nécessaires pour résoudre ces problèmes, finaliser ce projet. Enfin en 2018 la première éolienne offshore française (Floatgen), et la seule encore aujourd’hui, est ancrée et connectée sur Sem-ReV. C’était presque une première mondiale, une des toutes premières éoliennes flottantes dans le monde (cf photo ci-contre). En test jusqu’en 2023 elle injecte sur le réseau de quoi alimenter en électricité l’équivalent de 5 000 habitants, soit la taille de la ville du Croisic et de ses environs.

La démonstration est faite, les porteurs de projets frappent à la porte. Geps-Techno qui développe un prototype de récupération de l’énergie de la houle, Eolink un projet d’éolienne flottante très innovante d’une puissance de 5MW, Lhyfe qui ne produira pas d’électricité mais en consommera pour fabriquer de l’hydrogène en mer à partir d’énergie renouvelable dès 2022. Et cette fois ci ce devrait être une première, dans le monde !

Aujourd’hui Sem-Rev est victime de son succès, il n’y a plus de place sur le km2 de mer réservé par l’Etat pour les expérimentations, plus de puissance disponible sur la connexion à 10MW installée en 2012. La raison voudrait peut-être que l’équipe se repose, enfin, sur ses lauriers. Pourtant, l’urgence de la transition énergétique dope les initiatives.

En 2020, en pleine pandémie, l’éolien offshore devient le secteur industriel à la croissance mondiale la plus forte. Il y a urgence à proposer de nouveaux slots de tests, de nouveaux sites. Se coordonner à l’échelle nationale apparait comme une évidence et les projets un temps délaissés, comme Mistral au large de Marseille par exemple, doivent être développés. L’expérience, le savoir-faire de l’équipe Sem-Rev est unique, indispensable dans ce contexte.

Un jour il faudra tester des prototypes à 15 ou 20MW, et la création d’un site capable de les recevoir se prépare dès maintenant.

 

Consultez tous les articles du dossier intercentrale consacré à la mer : une économie bleue de plus en plus verte (accès adhérents ACL)

 

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