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19 mars 2019

Projet Tigoun : rencontre avec les vainqueurs de la Social Cup 2019

Enki Barache et Gauthier Perrin (promo 2015) ont remporté en février dernier la Coupe de France des jeunes entrepreneurs sociaux. Leur projet : créer un sac de conservation du riz qui permette aux petits producteurs de Madagascar de mieux répartir la vente de leurs récoltes tout au long de l’année. Rencontre.


Technica : Bonjour à tous les deux. Pour commencer, racontez-nous comment est né le projet tigoun ?

Enki : Je suis originaire de Madagascar et depuis tout petit, j’ai en tête de faire quelque chose pour participer à l’émergence de ce pays que je connais bien à se développer. Restait non seulement à trouver la bonne idée, mais aussi à savoir comment la développer au travers d’un projet d’entreprise. La rencontre avec Gauthier il y a quelques mois en filière entrepreneuriale a été le déclencheur du projet.

Gauthier : Je venais de passer 1 année de césure humanitaire à Madagascar dans une petite ville rurale au contact notamment des problèmes rencontrés par les agriculteurs locaux. Quand à la rentrée, chaque élève a présenté son projet d’entreprise, la connexion entre nous deux s’est faite naturellement autour de l’idée de proposer des solutions pour aider les agriculteurs malgaches à vivre de leur activité.

A quelles problématiques répond votre projet ?

Enki : Elles sont multiples. La culture du riz emploie 8 millions de malgaches. Parmi eux, de nombreux petits producteurs ne peuvent pas se permettre de stocker leurs récoltes dans des hangars afin de les protéger de la moisissure. Résultat, ils sont obligés de vendre leur production dès la récolte, au moment où les prix sont les plus bas. Mais le problème ne s’arrête pas là. 6 mois plus tard, ces mêmes agriculteurs sont souvent obligés de s’endetter pour racheter du riz pour leur propre consommation, mais cette fois, à prix d’or.

Comment êtes-vous passés du constat, à la solution ?

Gauthier : Nous avons consacré beaucoup de temps à échanger avec des ONG présentes sur place, ainsi qu’avec des chercheurs du CIRAD de Montpellier afin de visualiser tous les éléments du contexte et définir l’écosystème global. Ensuite, nous avons testé plusieurs pistes techniques comme des bâtiments de stockage, ou une machine thermique censée maintenir une atmosphère plus stable et propice à la conservation du riz. Mais très vite, nous nous sommes heurtés à des problèmes d’investissements qui nous ont obligés à revoir notre copie. On s’est alors concentré sur ce qui représentait le volume le plus faible : le sac de riz. L’idée était de concevoir un sac de conservation performant (12 mois de conservation au lieu d’un seul) qui permette aux producteurs de mieux gérer leur récolte et leurs stocks afin de mieux vivre de leur activité.


Au-delà de la logique économique, Tigoun possède aussi un fort impact social

Enki : On sait que le mot est à la mode, mais notre démarche s’inscrit dans une logique d’empowerment avec la volonté d’intégrer le projet au tissu local. L’idée est de tout produire et développer localement, en s’inspirant si possible des savoirs faire locaux. L’impact social de Tigoun sera présent sur l’ensemble de la chaîne de production, en s’appuyant sur une démarche de green empowerment grâce notamment au recyclage de matériaux utilisés dans la fabrication des sacs de riz.


Avez-vous déjà identifié les canaux de distribution sur lequels vous comptez vous appuyer?

Gauthier : Les ONG sur place sont des partenaires incontournables car elles sont déjà en contact avec les agriculteurs. Certaines familles influentes dans les villages peuvent également nous aider à diffuser notre message aux producteurs locaux, afin de leur expliquer concrètement les bénéfices qu’ils peuvent espérer de Tigoun.


Vous venez de remporter la Coupe de France des jeunes entrepreneurs sociaux, avec à la clé un accompagnement d’un 1 an par l’incubateur Makesense. Qu’est-ce que ça change concrètement ?

Enki : L’avantage de Makesense, c’est tout d’abord, d’être un incubateur spécialisé dans les projets à forte dimension sociale. C’est d’ailleurs un des plus importants au niveau mondial sur ces problématiques. Forcément, cela nous ouvre des perspectives nouvelles, comme gagner du temps sur le plan opérationnel, ou en rencontrant plus facilement les bonnes personnes susceptibles de faire avancer le projet.

Quelles sont les prochaines étapes du projet que vous avez identifiées dans les mois à venir?

Gauthier : Enki sera à Madagascar en mai pour réaliser une étude de terrain, faire évoluer la solution technique, et s’imprégner de l’écosystème de l’activité autour du marché du riz. Son retour coïncidera à l’été avec le début de l’incubation chez Makesense. Le point de départ d’une nouvelle phase dans le développement de la solution et de sa commercialisation.

 

Dernière question : entre-nous, ça veut dire quoi « Tigoun » ?

Enki : Tigoun, est la contraction de tiako qui veut dire « j’aime » en malagasy et du mot « gony » qui signifie « sac de riz ». C’est facile à retenir en plus de rester assez explicite pour les habitants de Madagascar.

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