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22 octobre 2025

Rencontre avec Aymeric Jusseau (01) - Directeur des systèmes d’information du groupe NUXE
Entre data, sécurité et innovation maîtrisée, Aymeric Jusseau (01) conçoit des systèmes d’information alignés sur la stratégie et les besoins métiers de NUXE.

À la tête de la DSI du groupe NUXE, Aymeric Jusseau défend une approche pragmatique du numérique : une DSI partenaire du business, architecte de la donnée et garante de la performance des systèmes. Face à la multiplication des solutions technologiques et aux promesses de l’IA, il privilégie une approche concrète et maîtrisée, tournée vers l’efficacité opérationnelle et la croissance durable, dans une entreprise où la technologie reste avant tout au service du produit et des métiers.


Technica : Vous êtes aujourd’hui directeur des Systèmes d’Information du groupe NUXE. Comment définiriez-vous votre rôle ?

DSI du Groupe NUXE est un rôle à plusieurs dimensions :
- horizontale pour répondre aux enjeux de tous les métiers de l’entreprise, en comprenant leurs besoins, préoccupations et capacités,
- verticale pour décliner la stratégie de l’entreprise conjointement avec le Comité de Direction en projets et mises en œuvre concrètes jusqu’à pouvoir challenger et s’impliquer dans les réalisations les plus détaillées, fonctionnellement et techniquement
- temporelle pour piloter les plannings et les engagements en cohérence avec les capacités
- financière par la maîtrise de l’élaboration et du suivi budgétaire, de la comptabilité des dépenses et de l’évaluation des moyens et des gains en amont
- sécuritaire en tant que garant de la sécurité informatique du Groupe dans un contexte géopolitique propice aux attaques contre les intérêts économiques français
- juridique et de conformité réglementaire dans un contexte où la DSI est force d’Achats et de création de partenariats, et où les réglementations nationales, européennes et internationales élèvent le cadre de protections

Technica : Qu’est-ce qui vous a donné envie de rejoindre un groupe cosmétique et international après votre expérience chez Wonderbox ?

NUXE est marque forte disposant d’un potentiel de croissance énorme en France et à l’international, tout en étant à une étape de son développement. Cela représente un formidable terrain de jeu pour un DSI dans l’optique de construire les systèmes d’information aptes à porter cette croissance.

Technica : Wonderbox est une entreprise très digitale, avec des enjeux d’e-commerce, de data et d’expérience client. En quoi cette expérience vous a-t-elle préparé à rejoindre un groupe comme NUXE, à la culture plus industrielle et marketing ?

Wonderbox a été pour moi une expérience rêvée de transformation des systèmes d’information d’une entreprise leader de son marché qui était à l’aube d’aborder un nouveau cycle de croissance. Au travers des projets menés avec succès sur des solutions leaders en matière d’ERP, de CRMs, d’eCommerce, de Supply Chain, ou développées in house sur des technologies de pointe, j’ai étoffé mes expériences et mon recul sur les avantages et points d’attention de chacune pour des choix adaptés selon les besoins et le contexte d’une ETI.

Technica : Pouvez-vous nous parler de quelques projets clés que vous pilotez actuellement ?

Naturellement confidentiels, il s’agit de grands projets de transformation en support de notre croissance alliant systèmes transactionnels et de data, tout en satisfaisant les besoins de chacun des Métiers

Technica : Quels sont les défis majeurs auxquels vous êtes confronté dans ces projets ?

Comme dans la plupart des ETI, chronologiquement :
- anticiper les besoins de l’entreprise, comme un urbaniste visionnaire, tout en satisfaisant l’immédiateté des besoins opérationnels des Métiers,

- qualifier avec le pragmatisme et le temps nécessaire les enjeux et ROI de chaque idée de projet avant d’en faire un projet,

- ne pas réduire les projets impliquant les Systèmes d’Information à des projets techniques mais bien des projets d’entreprise,

- faire comprendre le niveau d’implication des Métiers nécessaire pour la réussite des projets qui les concernent ou impactent,

- garantir cette disponibilité et motivation des Métiers sur toute la durée du projet, et non uniquement dans la phase initiale enthousiaste.

Technica : Concrètement, à quoi ressemblent vos journées ?

Aucune journée ne se ressemble, toutes mélangent de nombreuses réunions, points, comités projets, comités de pilotages, en parallèle desquelles gérer le flot de questions et réponses par emails et par messagerie instantanée ; les moments de réflexion et de production individuelle sont alors positionnés de bon matin et le soir ou parfois à mi journée.

Technica : Diriger une DSI, c’est aussi gérer des arbitrages entre innovation et stabilité. Comment trouvez-vous cet équilibre ?

Il ne faut pas confondre innovation et ‘gadgétophilie’. Le DSI n’est le pas le ‘geek’ suprême, c’est au contraire celui qui concilie les travaux de veille technologique avec la réalité des besoins de l’entreprise, puis opère des choix lorsque ces technologies répondent à un besoin réel tout en étant suffisamment éprouvées pour apporter tout à la fois leur valeur et une forme de stabilité. Stabilité qui reste relative dans la mesure où les cycles technologiques ainsi que les besoins d’une entreprise font que la gestion d’un Système d’Information concourent à gérer un éternel renouveau.

Technica : Comment imaginez-vous la DSI de demain : plus orientée business partner, data-driven, IA-centrée ?

Business partner est déjà la DSI d’aujourd’hui, sans quoi il s’agit uniquement d’un service informatique faisant partie de l’intendance de l’entreprise.

Data-driven désigne plutôt ce que peut être l’entreprise ou certaines de ses équipes : dans ce cas la DSI se doit a minima d’être le Data-provider, l’architecte urbaniste qui anticipe ces besoins en données, construit les fondations et peut se positionner en gardien du temple de la donnée de gestion juste. L’exploitation et la mise en forme de ces données peut ensuite être assurée par des équipes plus intégrées aux Métiers, avec ou sans animation transversale de la DSI voire parfois d’une équipe dédiée sous la direction d’un Chief Data Officer.

AI-centric serait une erreur comme toute mode Techno-centric (Web-centric, Saas-centric, Python-centric, etc…). L’IA a résolument franchi ces dernières années un pallier dans son développement et, comme avec l’arrivée d’Internet en son temps, est pleine de promesses portées pour l’instant par des solutions majoritairement immatures et surévaluées par rapport à la valeur qu’elles apportent factuellement aux entreprises. Et comme pour Internet, ces promesses se réaliseront dans la durée, après dégonflement de la bulle et maturation technologique des solutions. A court terme le DSI doit être à la fois opportuniste pour identifier les vraies pépites, vigilant pour éviter les dépenses d’énergie et de moyens financiers sur des projets sans ROI, et en veille pour préparer et accompagner l’intégration de l’IA à vraie valeur ajoutée dans les Systèmes d’Information de l’entreprise.

Technica : En termes de management : à quoi ressemble votre équipe aujourd’hui ? Et comment faites-vous pour attirer ou fidéliser les talents IT dans un secteur qui n’est pas perçu comme “tech first” ?

Mon équipe est constituée d’une bonne part de Chefs de projet, certains plutôt fonctionnels avec sensibilité technique, d’autres plus techniques avec sensibilité fonctionnelle, en sus des traditionnels techniciens et managers.

Ce mix permet à la fois de :
- positionner aux côtés des Métiers des interlocuteurs qui les comprennent, transcrivent leurs besoins en solutions et les guident dans la gestion des projets
- disposer d’un socle de compétences techniques aptes à réaliser les tâches standard en interne et à piloter des prestataires en débord et pour apport d’expertises spécifiques

Si la forte notoriété de la marque NUXE permet de se faire connaître des futures recrues, c’est ensuite en s’assurant de l’adhésion à ce projet de compétences complémentaires au sein d’une équipe forte, de croissance de l’entreprise et d’innovation maîtrisée que nous attirons et fidélisons nos talents.

Technica : Quels sont, selon vous, les grands défis numériques du secteur cosmétique dans les prochaines années ?

Le premier défi pour une ETI en croissance sur un marché très concurrentiel est de continuer à gagner de la part de marché, ce qui se traduit pour la DSI par le fait de construire les systèmes portant cette croissance, supportant l’innovation, apportant une contribution directe au business, tout en préservant les ressources financières de l’entreprise pour lui permettre d’investir aussi et surtout dans l’innovation et la qualité des produits ainsi que dans son développement commercial et marketing.

Dans ce contexte, la tentation de la Beauty-tech à base d’IA, de data ou de social commerce, dans laquelle les très grands groupes engloutissent des moyens disproportionnés est d’une priorité moindre, même si nous y avons naturellement un rôle à y jouer pour faire connaître au plus grand nombre la qualité et l’efficacité de nos produits. Produits qui procurent une expérience non numérique mais bien sensorielle !

Parmi les autres défis qui se renouvellent se trouvent ceux de l’environnement pour entretenir notre avance sur le marché en matière de naturalité et de sensorialité, ceux de la protection des données des consommateurs dans un secteur proche de la santé, et ceux de l’internationalisation pour cultiver la notoriété de nos produits auprès du plus grand nombre.

Questionnaire express :

- 3 adjectifs pour qualifier l’élève que vous étiez à Centrale Lyon ?

Actif, pour contribuer à 5 associations, la junior entreprise et aux activités sportives et instructives. Curieux, pour profiter pleinement de la grande variété des enseignements. Impatient enfin, pour rentrer dans la vie active et contribuer à construire le monde qui nous entoure.

- Votre matière préférée à Centrale Lyon ?

Supply Chain, en 3e année de Génie Industriel.

- Celle que vous appréciez le moins ?

Comptabilité, à laquelle je n’avais pas accroché en dépit de son fort intérêt que j’ai découvert par la suite en entreprise.

- Ce que vous vouliez faire comme « métier » pendant votre formation à l’ECL ?

Business consultant.

- Que penserait l’élève que vous étiez s’il découvrait votre parcours pro jusqu’à aujourd’hui ?

Une certaine fierté d’avoir réussi à concilier mes différentes passions d’ingénieur en un métier plus que jamais utile aux entreprises et dans lequel je progresse d’expérience en expérience.

- Un conseil que vous donneriez aux élèves actuellement à Centrale Lyon ?

Profiter de ce formidable cadre de développement personnel, technique, social et sportif, comme un tremplin vers le monde de l’entreprise.

 

Auteur

Aymeric Jusseau est directeur des systèmes d’information du groupe NUXE depuis 2021, où il pilote la transformation numérique de l’entreprise pour soutenir sa croissance et l’efficacité opérationnelle de ses équipes. Avant NUXE, il fut responsable du Système d'Information de Wonderbox (2015‑2021), supervisant des projets stratégiques complexes en ERP, CRM, eCommerce, supply chain et transformation digitale. Il a également travaillé chez Lagardère Travel Retail sur la refonte des systèmes logistiques et retail. Expert en management de projets et d’équipes pluridisciplinaires, il défend une approche pragmatique du numérique : la DSI comme partenaire du business, architecte de la donnée et garante de la performance des systèmes, conciliant innovation, stabilité et valeur ajoutée pour l’entreprise.

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