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07 septembre 2022

Hélène Stankoff (ECL1991) : Conseil en Propriété Industrielle et Mandataire agréée près l’Office Européen des Brevets

Conseil en Propriété Industrielle et Mandataire agréée près l’Office Européen des Brevets, Hélène Stankoff est associée du Cabinet Santarelli à Paris où elle conseille les entreprises et start-ups en matière de brevets et accompagne les investisseurs par la conduite d’audits PI et Due Diligence. Elle raconte pour Technica son parcours ainsi que les particularités d’un métier aussi méconnu que passionnant.


En quoi consiste votre travail de conseil en propriété industrielle ?

Mon rôle de Conseil en Propriété Industrielle (CPI) spécialisé en brevet d’invention est d’accompagner et conseiller mes clients dans leur stratégie de protection de leurs innovations technologiques. Je conseille tant des grands groupes privés ou des centres de recherche publics que des ETI/PME ou des particuliers désireux de lancer leur activité et créer une start-up.

La diversité de la clientèle rend la profession de CPI très enrichissante, l’accompagnement attendu par un grand groupe (souvent des grands volumes de brevets à rédiger ou des affaires contentieuses) étant très différent du conseil recherché par une start-up, tel que la définition d’une stratégie de protection qui s’adapte aux contraintes financières tout en créant des actifs valorisables lors des levées de fonds.

Qu'est-ce qui vous a menée jusqu'à cette voie professionnelle pas forcément "naturelle" pour une ingénieure ?

Mon entrée dans la profession de CPI est vraiment le fruit du hasard : en répondant à une annonce parue dans Le Monde, recherchant un ingénieur généraliste débutant (tout moi en sortie de l’ECL) alors que je cherchais vainement un poste dans un service qualité dans le secteur de l’agro-alimentaire, j’ai débuté dans un cabinet de Conseil de Propriété Industrielle parisien alors que je n’avais jamais vu ou lu un brevet jusque-là !

J’ai tout de suite accroché à ce métier qui a la particularité d’allier la technique et le droit : j’ai adoré ma formation en droit des brevets (passage obligé pour progresser dans le métier d’ingénieur brevet et pour obtenir la qualification de CPI en France et de Patent Attorney en Europe).

La rigueur des écrits, la logique des raisonnements pour démontrer la validité d’un brevet ou sa contrefaçon par un concurrent, tous ces aspects du métier de CPI me permettent d’utiliser les compétences acquises au cours de mes études scientifiques.

L'élève de Centrale Lyon que vous étiez serait-elle surprise par le poste que vous occupez aujourd'hui ?

Totalement ! j’avais une image de l’ingénieur en industrie, dans des services de R&D ou de qualité, très technique, et sur le terrain. Même si de nombreux élèves partaient aussi dans le management ou la finance, domaines qui ne m’attiraient pas, je n’avais jamais pensé au Droit ! ni à exercer dans un cabinet de Conseil. Alors que les Centraliens n’hésitent pas à rejoindre la profession de Conseil en Propriété Industrielle !

Saviez-vous ce que vous vouliez faire comme métier à la sortie de l'École Centrale de Lyon ?

Pensant travailler dans l’industrie, je souhaitais vraiment intégrer un domaine qui m’attirait, à savoir l’agro-alimentaire : j’ai donc effectué ma troisième année à l’Agro de Paris (en partenariat avec l’ECL) et un stage de fin d’étude de 6 mois dans le service qualité de la société Casino et ses usines de fabrication, principalement en charcuterie.

J’ai vraiment apprécié ce type de poste à l’époque, mais l’absence d’opportunités en sortie d’école (vous savez, toutes ces annonces qui demandent 3 ans d’expérience…) m’a fait bifurquer : il me reste toujours une appétence naturelle pour accompagner les sociétés de l’agro-alimentaire et protéger ou défendre leurs innovations.

Revenons à votre profession et au secteur de la protection des brevets. En France, seules environ 20% des demandes de brevet seraient déposées par des PME/PMI. Quels sont aujourd'hui les freins à la prise en compte par les dirigeants des questions de propriétés intellectuelles ?

Le manque de communication en France autour des brevets (avec une quasi absence de formation à la Propriété Industrielle des ingénieurs) est probablement le premier frein.

Mais on observe des changements depuis une dizaine d’années, les médias grand public s’emparant de ces sujets, n’hésitant pas à relater les batailles de brevets entre les géants des télécom APPLE et SAMSUNG par exemple, ou encore à débattre pour ou contre la levée des brevets détenus sur les vaccins contre la COVID 19.

Ces discussions passionnées illustrent bien les profits que peuvent tirer les déposants de brevets de leur politique de protection de leurs innovations et devraient inciter les PME/PMI à ne plus uniquement considérer le dépôt de demandes de brevet comme un simple coût.

On voit souvent les dirigeants de PME/PMI se tourner vers le dépôt de brevets après avoir été confrontés malgré eux à un litige en contrefaçon de brevets. Ils perçoivent alors l’intérêt d’avoir eux-mêmes un portefeuille de brevets tant pour dissuader les concurrents de venir sur leur marché que comme moyens de défense (en rendant la pareille) vis-à-vis des droits de brevets des concurrents.

Il est vrai que les démarches pour la protection en France, puis à l’étranger, peuvent être complexes, mais tant les offices de brevet que les CPI s’emploient à les rendre plus simples et fluides pour les entreprises, et notamment les start-up.

Le droit de la propriété industrielle est d'autant plus complexe qu'il s'inscrit dans un contexte européen voire mondial. Est-ce toujours facile de se repérer entre les différents process et législations ?

La profession de CPI est une profession réglementée et à ce titre, est régie par la CNCPI (Compagnie Nationale des CPI) qui a pour mission en autre de former et informer ses membres des évolutions législatives en France et dans le monde.

Nous entretenons aussi des relations étroites avec des confrères étrangers, nos homologues dans tous les pays du monde, de telle sorte que nous sommes informés des changements législatifs sans tarder et que nous nous appuyons également sur leur expertise pour conseiller nos clients sur leur protection hors Europe.

Finalement, chaque CPI a un devoir de formation (Formation continue obligatoire) d’au moins 20 heures par an, on ne peut pas se reposer sur nos acquis !

Pour conclure notre entretien : quelles sont selon-vous les évolutions futures attendues en matière de propriété industrielle, et lesquelles vous semblent de nature à rendre la protection des inventions plus attractives ?

La coopération entre les Offices de brevets se renforce année après année, afin d’uniformiser les critères d’examen de la brevetabilité des brevets dans le monde. Bien qu’il n’existe pas de brevet mondial, les Offices de brevets sont de plus en plus enclins à tenir compte des recherches d’antériorités et des examens déjà réalisés par certains Offices, ce qui facilitent les procédures et en diminuent les coûts pour les déposants de brevets.

Par ailleurs, le système européen des brevets va connaître un grand changement, annoncé pour 2023 : l’Europe devrait enfin, après de nombreuses années de discussions, se doter d’un Brevet Unitaire (un titre de brevet unique valable dans plusieurs pays de l’UE) et d’une Juridiction Unifiée des Brevets (JUB) qui rendra des jugements sur la validité des brevets et leur contrefaçon de manière centralisée (à la différence d’aujourd’hui où des actions en justice doivent être menées en parallèle dans les différents pays de l’UE).

Nul doute que ces évolutions majeures devraient inciter les entreprises françaises ayant un marché dans l’Union Européenne à protéger leurs inventions !

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Conseil en Propriété Industrielle et Mandataire agréée près l’Office Européen des Brevets, Hélène STANKOFF est associée du Cabinet SANTARELLI à Paris où elle conseille les entreprises et start-ups en matière de brevets et accompagne les investisseurs par la conduite d’audits PI et Due Diligence. Voir les 7 autres publications de l'autrice
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